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Par Tecna1 le 16 Avril 2022 à 17:17
VIENT DE PARAÎTRE
Jacques Ancet
Zone franche
Poèmes II1974-1980Tarabustelisière
ce qui commence n'a
pas de nom
ce qui bouge
un peu de sang
qui brille dans l'obscur
des lèvres peut-être
des feuilles une
main dessinant
la page noire encore
ce qui parle n'a
pas non plus de voix
crissement sous la pierre
grincement sous l'écorce
des lèvres cherchent
à le dire haleine
flottant un instant dispersé
par le vent par
le temps sans visage
ce qui parle n'a
pas de mots
seule une trace claire
sur l'ombre de la page
traçant un chemin
vers ce qui est sans nom
signes obscurs et
mouvements du corps
écoutant
guettant
éclat
jeté contre la vitre noire
brisant
l'un après
l'autre chaque
mot
pour commencer
le jour
à la pointe du jour
veille l'éclair du sang
le silence n'est plus noir
les mots cherchent l'issue
lampe ou miroir?
si proche le soleil
un cri traverse le silence
la main touche son ombre
le corps parle jaunevotre commentaire
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Par Tecna1 le 14 Décembre 2021 à 10:25
VIENT DE PARAÎTRE
Jacques Ancet
Perdre les traces
La Rumeur Libre
Il suit les traces. Il les perd.
Dans le plein, il voit le vide.
Des noms se dispersent. Il voit
luire les restes du jour.
Il ne compte plus sur ses doigts.
Il ne ferme pas les yeux.
Il est au bord. Il attend.
*
Seul, avec le noir de la nuit
qui persiste dans le jour.
Seul, même avec, à côté,
le pied, la main, le visage,
le partage du silence,
chaque objet dans son contour.
Seul avec la voix qui parle.
*
Le bruit sec que fait la tasse.
C'est bien, dit-il, c'est très bien.
Et maintenant, que fait-on ?
Du jour est tombé un voile
gris. Personne n'entend rien
ni ne comprend rien, d'ailleurs.
Il regarde, il ne voit pas.
*
Parfois il voit la lumière :
elle vient sans qu'il l'attende.
Elle est là sur une feuille,
sur le sol, sur les doigts.
Il ne compte plus. Les nombres
se sont perdu. Il attend
prononce un mot — et l'oublie.
*
Il se dit qu'il est trop tard.
Malgré tout, il continue.
Les ombres tremblent toujours
et les voix n'ont pas cessé.
Il pourrait bien les comprendre
mais comprendre, pour quoi faire ?
Le jour est une étincelle.votre commentaire
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Par Tecna1 le 27 Mai 2021 à 22:51
VIENT DE PARAÎTRE
Jacques Ancet
L'Amitié des voix
I Les Voix du temps
Editions publie.net
Les textes ici réunis sont de plusieurs ordres : des essais, des préfaces à des traductions, et de simples notes de lecture. Ces notes, j’ai beaucoup hésité à les faire figurer dans cet ensemble. Si je me suis décidé, c’est parce que, malgré leurs limitations évidentes (elles ne portent souvent que sur un livre et parfois sur des écrivains ou des poètes un peu oubliés), et à côté d’études plus générales et d’une plus grande extension, elles témoignent d’un itinéraire de lecteur guidé surtout par les circonstances et un plaisir ou une émotion que j’espère pouvoir encore faire partager. Qu’on ne voie donc là aucun panorama ou palmarès mais, plutôt, une géographie de préférences personnelles qui s’étend sur près de quarante ans. Les voix dont il est question dans le titre viennent d’époques et d’horizons différents avec, bien sûr, une dominante franco-hispanique où se confond ma double activité d’écrivain et de traducteur.
Mais pourquoi avoir entrepris ce travail ? Peut-être, d’abord, afin de mettre de l’ordre là où il n’existe que le désordre du devenir qui emporte, qui efface tout. Autrement dit, pour garder une trace. Avec cet étonnement de voir, au fil du temps, se dessiner un chemin qui n’existait pas au moment où je le parcourais. Un chemin ou une cohérence qui tient à un questionnement insistant déjà au centre d’un recueil d’essais récemment paru : qu’en est-il des rapports de l’écriture et du réel — de la littérature et de la vie ? C’est pourquoi ce livre ne pouvait s’ouvrir que par une réflexion sur Don Quichotte qui est, sans doute, la tentative la plus profonde jamais menée pour répondre à cette question. Et c’est, peut-être ce qui réunit les auteurs ici présents. Avec, aussi, le cours d’une existence habitée par l’amitié de ces voix qui, toutes, ponctuellement ou plus durablement, m’ont accompagné au long des années. C’est ainsi que, tout autant que réflexion au sens spéculatif, ces textes le sont au sens spéculaire du terme : ils réfléchissent une clarté — une échappée — qui a souvent éclairé ma lecture et ma vie et dont, depuis longtemps, je voulais témoigner.
L’ordre choisi n’est, tout simplement, que l’ordre chronologique : quatre auteurs du XVIe siècle espagnol et deux du XIXe français (Cervantes, Jean de la Croix, Góngora, Quevedo, Mallarmé, Rimbaud) ; des auteurs nés à la fin du XIXe siècle et dont la vie et l’œuvre se sont déroulées pour une bonne part dans la première moitié du XXe (Unamuno, Jiménez, Gómez de la Serna, Reverdy, Huidobro) ; des auteurs nés dans la première et au début de la seconde décennie du même siècle (Aleixandre, Cernuda, Zambrano, Guillevic, Ritsos, Simon, Cortázar, Malrieu, Paz) .
Le deuxième tome, Le temps des voix, réunit pour sa part des auteurs contemporains presque tous encore vivants, dont la naissance s’échelonne, en gros, dans la décennie des années 20 et 30 et 30 et 40. D’autres auraient pu figurer ici, notamment de plus jeunes, mais il fallait se donner des limites et c’est bien arbitrairement que ce parcours s’achève finalement avec deux auteurs nés au seuil des années 40, auxquels est venu récemment s’adjoindre, par l’effet des circonstances, en l’occurrence sa disparition prématurée, la voix d’Antoine Emaz.votre commentaire
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Par Tecna1 le 24 Octobre 2020 à 11:26
VIENT DE PARAÎTRE
Jacques Ancet
La vie, malgré
Lettres Vives
La vie, malgré. Malgré quoi ? Malgré tout. Tout ce qui l’obscurcit, la salit, la détruit. La vie malgré la douleur, la déchéance, la mort. Au jour le jour. « Chronique », donc. Comme cette Chronique d’un égarement dont ce livre est en quelque sorte un prolongement. Ou « journal », si l’on préfère. Journal du temps. Car ces pages relèvent essentiellement du journal, de cette écriture non pas des événements de ma vie, de mes sentiments, de mes pensées, mais du jour, de sa lumière, de son perpétuel recommencement — de cette extase ou Amnésie du présent, pour reprendre le titre d’un essai récemment paru. Journal, oui, de l’énigme d’être là, d’être vivant. Comme, à propos du poème, et à sa manière inimitable, Mallarmé l’a, en son temps, si parfaitement formulé : « Tout le vol vital de traits composant ces chants brefs, équivaut, sitôt leur évanouissement, au plus transparent silence, muet comme l’émotion de vivre. »
Suivre le murmure
On ne se bat pas — on est le champ de bataille. D’ailleurs, contre qui, se battre ? On ne sent rien, on ne voit rien, on n’entend rien. Dehors, rien n’a changé : l’air et le visage qui sourit. Et tout semble si tranquille. C’est dedans que ça se bat — et on suit : on ne fait que suivre.
Comment dire moi, puisque moi — comment dire — ça n’est pas moi ? Une pluie d’éclats et d’ombres, comme un feuillage agité par le vent. Un sommeil, un éveil confondus, des visions — montagne table, vent, pieds croisés — un aveuglement, oui. Et comment ne pas dire ce vacillement bref : quelque chose se tient là — quelque chose n’est plus là.
Quelque chose qui ? Le pli obscur ? Quelque chose quoi ? Lente, obstinée, la pluie qui dure ? Ce qu’on cherche est là. Mais où ? Dans la lueur des gouttes ? Dans les mots qu’on écoute ? Qu’entend-t-on ? Que voit-on ? Les oreilles sont des yeux. Dedans, pourtant, n’a pas d’oreilles. Ni de bouche. Dedans, c’est dehors. On y est sans y être. On y entend la voix ? Et que dit-elle ?
Elle dit ce qu’elle dit. Et ce qu’elle dit, c’est elle. On l’entend sans l’entendre. On plaisante, on rit, elle est là. Et quand on croit se taire, c’est elle qui parle. Elle ou lui ? Ni l’une ni l’autre. En silence elle luit. Met du clair sous les mots. Traverse le jour, veille la nuit, s’arrête dans une image : gravier laurier, un peu de vent. On la reconnaît, elle vient de loin — ou de tout près, c’est pareil.
Elle dit : ne regarde pas, écoute. C’est comme si elle tendait la main et pourtant ne montrait rien. Ou une confusion de couleurs et de formes. Et quelque chose comme un vent qui les traverse, les éparpille. Ecoute, oui, écoute. Laisse les images, suis le murmure.
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Par Tecna1 le 3 Mars 2020 à 18:36
VIENT DE PARAÎTRE
Jacques Ancet
Chutes V
Alidades
Chutes: non pas ce qu'on a laissé tomber, mais, en retrait de l'écriture, le mouvement de la pensée, lacunaire, éclectique en apparence et pourtant toujours revenant aux mêmes questions, comme une lampe qu'on déplace autour d'un objet, dont s'éclairent les différentes faces, dans le recherche jamais atteinte d'une totalité toujours ouverte.
Ce cinquième cahier rassemble les notes de 2005 à 2010.
L'Éditeur
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