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Courbe du temps
Courbe du temps (1971-1972)
souvenons-nous toujours de la lumière
sur les fleurs roses du pêcher
de la lenteur des gestes
une main sur un front
de la lenteur des choses
cette lenteur terrible de la vie
comme une boucle qu'on dénoue
*
ce jardin où croissait l'anémone
transpercé de silence
nous l'habitons toujours
et chacun de nos gestes devient
un peu plus lent comme l'image
qui s'efface d'un geste ancien
inachevé
*
crois-tu que le bonheur habite le sourire
toi qu'un souffle bascule
en deçà de toi-même
tu n'entends pas le bruit que fait la pluie
ni l'appel jaune du coucou après l'orage
en toi les signes se dispersent
lueurs d'une eau qui s'évapore
*
écorce et sable le temps crisse
sur la mousse bleue d'un visage
qui écoute bouger les heures
dans un feuillage sans mémoire
la demi sonne au clocher mince
un homme incliné sur les blés
ne voit pas l'ombre remonter
des racines vers le feuillage
un très lent éclair le transperce
dont n'apparaît nulle blessure
*
quand le regard devient regard
la main s'arrête un peu
comme pour écouter
la lumière à quatre heures
est l'or déclinant d'un fruit
le ciel plus pur encore
que celui de l'enfance cachée
dans le vert tremblement des poires
sous l'arbre s'incline une tête
selon la courbe de sa vie
vivre vivre blessure lente comme neigeTags : Ancet Jacques, poèmes épuisés
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